Un an après l’élection de François Hollande et le retour de la gauche au pouvoir, les Français expriment leur doute, dans les enquêtes d’opinion comme lors des élections partielles. Sur fond de crise persistante, le « redressement juste » promis par le Président de la République apparaît trop souvent, aux yeux de nos concitoyens, comme « juste le redressement ».
Les couches moyennes et les classes populaires qui ont permis l’élection de François Hollande attendent des résultats de la gauche sur le terrain du pouvoir d’achat. La politique menée par notre majorité doit absolument produire des effets réels en bas de leur fiche de paye sous peine de sanction dans les urnes. Au-delà de la politique salariale qui doit demeurer dans la boîte à outils du gouvernement, les prochains projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale sont l’occasion pour la majorité d’actionner l’indispensable levier de la politique fiscale. Alors que l’effort de réduction des déficits rend vaine la promesse de la « stabilité fiscale », il est possible de démontrer que la gauche n’est pas synonyme de « matraquage fiscal » et que l’impôt, qui a souvent un caractère anxiogène, peut aussi être un authentique outil de redistribution.
Responsables et parlementaires de la majorité, nous appelons de nos vœux la mise en œuvre d’une grande réforme fiscale conformément à l’engagement n°14 du Président de la République pour rendre du pouvoir d’achat aux couches populaires. C’est à cette condition que nous pourrons conserver leur confiance.
Nos propositions pour une réforme fiscale se déclinent en quatre temps :
1. Rendre la CSG progressive pour redonner du pouvoir d’achat aux Français modestes ;
En juillet 2012, la hausse du SMIC, premier coup de pouce du gouvernement en faveur des Français les plus modestes, a permis d’augmenter leur salaire net de 6 euros. Dès 2014, nous proposons une deuxième étape avec la mise en place d’une CSG progressive. Une simple baisse de 2 points de la CSG due par plus de 50% des Français (salaire médian) aurait pour effet :
• Pour un célibataire au SMIC, une augmentation d’environ 30 euros par mois de son salaire net ;
• Pour un couple marié rémunéré au SMIC, avec deux enfants à charge, une augmentation pour l’ensemble du ménage de 76 euros par mois.
Cette baisse du taux de CSG serait financée par des hausses correspondantes sur les revenus supérieurs, à partir d’un seuil qui tiendra compte des hausses d’impôts déjà votées depuis 2012. Afin d’éviter la censure du Conseil constitutionnel, nous proposons la mise en place d’un mécanisme de correction prenant en compte la situation familiale et conjugale en année n+1 au moment de la déclaration d’impôt sur le revenu.
2. Modérer les hausses de TVA prévues pour financer le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), mesure qui coûte 20 milliards d’euros par an et dont l’utilité reste à prouver.
3. D’ici à 2017, avancer par étapes vers l’individualisation de l’impôt et l’unification de la CSG et de l’impôt sur le revenu.
La poursuite de la grande réforme fiscale consiste en la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG en un grand impôt sur le revenu à la fois progressif, individualisé et prélevé à la source. Pour contourner la censure du Conseil constitutionnel, il pourrait être laissé au couple – marié, pacsé ou concubin – la possibilité de déclarer leurs revenus en commun ou de manière individuelle. Un dispositif pourrait être mis en place pour inciter à l’individualisation. La charge liée aux enfants serait compensée par un crédit d’impôt forfaitaire.
4. Pour une fiscalité écologique populaire et efficace.
Conduire notre économie vers un nouveau modèle de développement exige la mise en place d’outils fiscaux propres à faire évoluer les comportements et faire payer à leur juste prix les impacts environnementaux des activités humaines.
Nous proposons donc que dès le budget 2014 soient intégrés dans l’architecture fiscale un premier signal vers la convergence essence/diesel, les bases d’une contribution climat-énergie (qui doit aussi toucher les importations) et que soit programmée la suppression rapide des niches fiscales défavorables à l’environnement.
La fiscalité écologique suppose des mesures d’accompagnement et de compensation pour les ménages, comme pour les entreprises. Elle est un réel levier pour le redressement productif et l’emploi. Elle stimule l’innovation industrielle et technologique. Son produit doit donc être totalement affecté à la transition écologique et ne peut abonder à d’autres dispositifs. Aussi nous en concluons que la fiscalité écologique n’est pas encore assez mature pour qu’il lui soit assigné le devoir de financer le CICE.