Le Monde 13/12/2013
Le modèle social, dans l’esprit des Français, c’est, au-delà du régime de la protection sociale, un mode de vie, la manifestation de la solidarité de la société. Pourtant, notre logiciel de pensée, hérité de la seconde révolution industrielle, s’articule autour de la protection du salarié et, ou, du travailleur.
Dans le domaine de l’éducation et de la formation, la France est la championne de la préscolarité, mais possède un taux de 5,7 % en matière de participation des adultes à l’apprentissage tout au long de la vie. Plus fondamentalement, la réflexion engagée impose de mieux évaluer l’impact des dynamiques et l’interaction entre le modèle social français et les politiques européennes.
Le développement du marché intérieur et la nécessité de sauvegarder la zone euro conduisent à des évolutions majeures, dont la mobilité des travailleurs ne sont que l’un des reflets. La progression des taux de chômage est plus rapide et plus divergente dans la zone euro qu’au sein de l’Union.
CRÉATION D’UNE INDEMNITÉ-CHÔMAGE MINIMUM
Ce déséquilibre, aussi insoutenable que l’instabilité des marchés financiers, ne laissera pas le modèle social français intact et explique le débat lancé sur la création d’une indemnité-chômage minimum conduisant à développer une perspective de protection sociale européenne (PSE) et de véritables stabilisateurs automatiques pour la zone euro.
Sur le front de la protection sociale, la contribution de l’Union européenne est en marche, même si elle est très souvent sous-évaluée. L’initiative pour l’emploi des jeunes et la garantie jeunesse en sont la marque. Bien sûr, le modèle social français ne sera pas entièrement soluble dans la construction européenne. La question du pourcentage du produit intérieur brut consacré par l’Etat aux dépenses sociales et les enjeux fiscaux relèvent du choix de chaque Etat.
Mais cette situation n’exonère pas la France de s’impliquer dans le débat européen, notamment dans le domaine de l’investissement social. Cette démarche permettrait de valoriser le potentiel du modèle social français et de bénéficier des avantages de l’Union dans la lutte contre les inégalités.
Elle permettra aussi de renforcer le socle de solidarité entre les générations et entre les territoires, auquel les Français sont attachés.