Notre principal partenaire, les Etats-Unis, a décidé, sous la responsabilité de son Président, d’ouvrir une guerre commerciale en augmentant les tarifs sur l’importation d’acier et d’aluminium. Dans sa réponse, l’Union européenne a jusqu’ici donné l’image d’une remarquable force, celle de l’unité, y compris dans le respect de ce qu’elle est, un Etat de droit, en saisissant l’Organisation mondiale du commerce. Mais cette force ne peut exister dans l’épreuve ou sur la durée sans force intérieure. Celle-ci repose sur des valeurs, bafouées en Hongrie ou en Pologne, sur un marché intérieur aux vertus duquel les Britanniques, qui en étaient les premiers défendeurs, ont dit ne plus croire en préférant sortir et sur l’euro qui, même s’il n’est pas la cause de tous les maux de l’Italie, doit être convoqué tant la situation économique de ce pays ne cesse d’inquiéter alors que, pays fondateur, il vient de se doter d’un gouvernement d’extrême droite.
C’est dans ce contexte que la Commission Juncker, celle de la dernière chance, vient de mettre sur la table un embryon de budget de la zone euro ; même s’il constitue une première que l’honnêteté intellectuelle oblige à saluer, il ne fera pas de mal a une mouche, il ne sauvera personne. Cela n’est pas la réponse dont l’Union, la zone euro, ont besoin.
Le président français qui a, à juste titre, donné beaucoup d’importance à la dimension européenne de sa campagne, de son mandat, a d’abord appliqué la méthode qu’il avait inspirée à son prédécesseur, faire les réformes en France pour être crédible dans les demandes portées pour l’Europe. Admiré outre-Rhin par certains pour le bilan de ses réformes, il reste, dès lors qu’il propose un budget pour la zone euro, suspect de vouloir redistribuer l’argent allemand.
Et ce n’est pas la réponse que la chancelière Merkel, maîtresse dans la mise en échec de ses partenaires, vient de lui faire qui apportera la solution. Affaiblie par ses résultats électoraux, fatiguée par la négociation de la grande coalition et l’œil en permanence sur les progrès des eurosceptiques de l’AFD, elle reparle de restructuration de la dette comme si elle était prête à reproduire les fautes de la période Sarkozy.
Dès lors, une question se pose pour ceux qui depuis tant d’années demandent un meilleur équilibre entre responsabilité et solidarité, et de compléter l’Union économique et monétaire : se taire faute d’être entendus ou continuer en croisant les doigts d’être entendus avant qu’il ne soit trop tard ?
Mais alors quelque chose doit changer. Quoi ? La crise de la chaise vide, la fin de la diplomatie, un budget de l’Union coupé en deux entre pays membres de la zone et les autres ? Ce sera bientôt aux Européens de répondre.