De nombreux pays continuent de lutter pour sortir de la période de récession mondiale la plus grave depuis 1930. Il serait utile de saisir l’occasion pour apporter des changements en profondeur et mettre en place un système économique dont la Grèce et les Européens peuvent être fiers, a déclaré M. Papandreou devant la commission spéciale du Parlement sur la crise financière, économique et sociale (CRIS), jeudi.
Lors d’une audition publique sur la gouvernance économique européenne et les instruments européens pour le redressement économique et social, le premier ministre grec a indiqué qu’au plus profond de la crise, son gouvernement mettait œuvre les mesures les plus sévères qui aient été prises depuis la seconde Guerre mondiale pour rétablir la situation. Malgré cela, la Grèce ne demandait pas d’aide à l’Union européenne, confiait le président de la CRIS, Wolf Klinz (ADLE, DE), évoquant la décision prise mardi par les ministres des finances de l’UE en vue de soutenir les « mesures d’austérité très ambitieuses » avancées par Athènes.
« Nous ne cherchons pas de bouc émissaire et ne demandons pas d’aide qui nous ferait vivre au crochet de nos partenaires, mais nous avons besoin d’un large soutien politique pour entreprendre toutes nos réformes et nous assurer que nous ne devrons pas payer plus qu’il ne faut » a indiqué M. Papandreou. Selon lui, la Grèce devrait « pouvoir emprunter à des taux raisonnables ». Appelant à mettre un terme à la spéculation opportuniste, il a averti que si le gouvernement grec continuait à emprunter à des taux aussi élevés, il ne serait pas en mesure de réduire son déficit.
« Nous sommes profondément choqués par le fait que ceux qui avaient dû être soutenus avec l’argent des contribuables aient choisi la première occasion pour spéculer sur l’euro » a déclaré Wolf Klinz, sous les applaudissements nourris de la salle. « Il nous faut plus d’Europe, pas moins d’Europe » a souligné M. Papandreou. Nous devons prendre des mesures pour faire en sorte que les marchés réagissent positivement. À ce titre, le cas de la Grèce pourrait être l’occasion d’aborder la question de la spéculation dans l’Union européenne et également à l’échelle mondiale. S’associant à une déclaration de Dominique Strauss-Kahn lors de sa visite au Parlement européen le jour précédent, M. Papandreou a rappelé combien il était important de ne pas rater l’occasion d’établir un système financier mondial.
Toutes les mesures prises par la Grèce montrent son engagement pour préserver la stabilité de la monnaie unique, a indiqué le Premier ministre. Mais l’Europe doit accepter qu’il faudra un certain temps avant que les mesures mises en place, et celles à venir, ne produisent leur effet. « Le changement ne peut s’effectuer aussi rapidement que les contrats d’échange sur défaut » a-t-il indiqué.
L’UE doit-elle changer sa politique ?
Parmi les intervenants, Theodoros Skylakakis (PPE, EL) et Pascal Canfin (Verts/ALE, FR) ont soulevé la question des réformes du pacte de stabilité et de croissance. Fallait-il le rendre plus strict ou plus souple? M. Papandreou a répondu que l’Union européenne devrait se pencher sur les institutions qui sont absentes dans ce projet. Il a appelé à davantage de coordination et de supervision afin que les pays en difficulté bénéficient également d’une aide, au lieu d’être seulement sanctionnés. Sinon ce sera l’échec, non seulement pour le pays concerné, mais aussi pour l’ensemble du système.
« Nous affirmons tous que les instruments sont nombreux, mais personne ne les respecte, car personne ne souhaite en assurer la coordination » a indiqué Pervenche Berès (S&D, FR), rapporteure de la CRIS, qui a estimé que les mesures prises par la Grèce forçaient l’admiration.
Nikolaos Chountis (GUE/NGl, EL) a demandé au Premier ministre si un plan d’appui spécifique avait été élaboré par l’UE pour venir en aide à la Grèce et si ce plan contribuerait également à sortir l’Union européenne de la récession. « Je préférerais une solution européenne de manière à prouver au monde que l’Europe peut être unie dans l’action » a déclaré M. Papandreou, « plutôt que de nous tourner vers le Fonds monétaire international.
D’après Mario Borghezio (EFD, IT), « les mesures trop draconiennes mènent la Grèce à sa perte ». Il a demandé si le gouvernement grec avait envisagé l’option d’une dévaluation. M. Papandreou a rejeté cette option qui, à son sens, produirait de faux espoirs.
Une coordination accrue des politiques économiques et un système d’assistance conditionnelle
Plusieurs universitaires participaient également au débat. Selon Loukas Tsoukalis, professeur chargé d’études sur l’intégration européenne (bourse Jean Monnet) à l’université d’Athènes et président d’Eliamep (Fondation hellénique pour la politique européenne et de sécurité), le pacte de stabilité et de croissance est devenu « de plus en plus flexible, dit de façon diplomatique ». Il a appelé au renforcement de la dimension européenne de l’union monétaire, notamment par le biais d' »une coordination plus étroite et plus contraignante des politiques économiques nationales, doublée d’incitations et de sanctions ».
S’agissant des enseignements à tirer de la crise, Jean Pisani-Ferry, économiste de l’université de Paris-Dauphine et associé du think tank Bruegel, a souligné l’absence de politique de gestion de crise dans la zone euro. « La Grèce applique le programme du FMI sans l’argent du FMI » a-t-il déclaré, tout en ajoutant qu’au vu du « principe de non-coresponsabilité pour la dette publique » et du « principe de non assistance », l’Union européenne ne pouvait octroyer d’aide à l’intérieur de la zone euro. Mais comme le cas se prêtait à l’octroi d’une assistance, l’UE devrait mettre en place un « système d’assistance conditionnelle ».
Prochaines étapes
La contribution des experts alimentera la poursuite du débat entre députés et viendra étayer le rapport élaboré par Pervenche Berès, rapporteure de la commission spéciale. Le projet de rapport sera présenté le 17 mai, assorti d’un délai pour le dépôt d’amendements fixé au 1er juin. Le vote du rapport en commission est prévu le 13 juillet et le vote en session plénière, en Septembre II.