Euractiv, Entretien
Jeudi 28 juin 2012
Pour l’eurodéputée socialiste, renforcer le projet européen en misant seulement sur la discipline budgétaire est risqué. Il fait courir le risque d’une rupture avec les peuples.
Que vous inspire la nécessité d’accroître le contrôle sur les budgets nationaux, une demande formulée par l’Allemagne ?
Tout le monde est d’accord pour aller vers plus d’intégration. C’est la méthode qui pose problème. Comment faire pour que ce soit démocratique ? Il faut qu’il y ait une vision européenne de la façon dont chaque Etat s’engage à travers ses politiques budgétaires. Mais il faut aussi regarder concrètement à qui ce pouvoir est confié.
En mai dernier par exemple, la Commission a adressé des recommandations à la France en se fondant sur le programme national de réforme adressé par le précédent gouvernement le 4 mai… Elle ne tient donc pas compte de l’alternance politique et recommande par exemple de ne pas augmenter le Smic. On se dit qu’entre bureaucratie et démocratie, il y a un fossé dont on n’a pas vraiment pris conscience. La Commission aurait dû être plus politique et demander un autre document pour tenir compte de l’élection de François Hollande.
Sur la croissance, François Hollande avait tapé du poing sur la table pendant la campagne. Or, les mesures qu’il propose aujourd’hui sont du recyclage d’initiatives européennes consensuelles…
Ce qui compte, ce sont les engagements du président élu. Il a dit que l’initiative de croissance passait par la remobilisation des fonds structurels, l’intervention accrue de la Banque européenne d’investissement et les project bonds.
Ensuite, on peut se demander s’il faut aller au-delà. François Hollande avance avec beaucoup de détermination, sans brutalité, avec un sens des situations extrêmement politique.
J’ai l’absolue conviction qu’il n’a renoncé à rien mais qu’il ne va pas aller s’exposer pour rien non plus.
Il faut convaincre l’Allemagne afin qu’elle ne se sente pas blessée, heurtée. Avant, la France n’avait rien à dire puisqu’elle s’alignait toujours. Pour les partenaires allemands, ça change un peu la donne.
Angela Merkel en appelle à des transferts de souveraineté et évoque la nécessité d’une union politique. Est-ce vraiment ce que veut la France ?
Aujourd’hui, il faut faire bouger les choses, sans avoir à faire des interprétations sur le sexe des anges pour savoir ce qu’est l’union politique ou économique. Si nous voulons avancer, il faut que les conditions soient réunies. Et pour cela il faut que la saignée cesse.
Comment imaginez-vous faire accepter par les peuples d’Europe davantage d’intégration, davantage de fédéralisme, alors qu’ils ne voient venir de ce pouvoir fédéral que de l’austérité et de la saignée ? Il faut réunir les conditions politiques d’une avancée, recréer une forme d’espoir à l’échelle de l’Europe. C’est exactement la pensée du président de la République.