Réuni jeudi 8 juillet à Bruxelles sous la présidence de Joëlle Milquet, vice-première ministre et ministre belge de l’Emploi, le Conseil informel Emploi a discuté du rôle des politiques de l’emploi dans la nouvelle gouvernance économique. Les ministres des 27 ont fait part de leur analyse et de leurs propositions au cours du déjeuner avec le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, qui s’y est montré très ouvert. M. Van Rompuy a démontré à quel point seule une croissance porteuse d’emplois pouvait permettre de sortir de la crise et à quel point l’emploi était un facteur de compétitivité. Le président Van Rompuy a également considéré que « le Conseil Emploi- Affaires sociales (EPSCO) devrait jouer un rôle plus important dans la future gouvernance économique, que la coordination avec le Conseil ÉCOFIN est indispensable et que l’articulation entre les surveillances macro-économiques et thématiques doit être revue ». Un discours qui a ravi Pervenche Berès, la présidente de la commission emploi et affaires sociales du Parlement européen, invitée à la réunion ministérielle et qui a vu, dans la participation d’Herman Van Rompuy, « un symbole extrêmement fort, parce que, depuis qu’il est président permanent du Conseil européen, c’est le premier
Conseil auquel il participe ». La Commission était représentée par Laszlo Andor.
Pervenche Berès: « L’enjeu actuel est de voir ce qui a raté avec le Pacte de stabilité et de croissance
lors de son adoption en 1997 »
La Task Force sur la gouvernance économique présidée par Herman Van Rompuy est composée des ministres des Finances, de la BCE et de la Commission dans sa composante ÉCOFIN et l’organe de préparation des travaux, c’est le comité économique et financier, a rappelé Pervenche Berès à la presse, ajoutant: « C’est dire si les enjeux Emploi et Affaires sociales ne sont pas au cœur de l’alimentation des travaux de ce groupe de travail ! ». Au-delà du « symbole » que constitue la participation de M Van Rompuy, Pervenche Berès a dit croire que « cette rencontre était très importante pour faire entendre une petite musique et pour qu’en ait une traduction concrète dans les travaux de ce groupe, lequel pilote une réflexion sur un sujet qui est en jachère depuis 13 ans, en 1997, date d’adoption du Pacte de stabilité ! ». Et Pervenche Berès de mettre en exergue « un élément qui a été totalement sous-évalué » à cette époque: « c’est le risque de divergences entre la compétitivité des économies européennes et la création de nouveaux déséquilibres internes ». Or, a expliqué la députée socialiste française, après dix ans de fonctionnement de la zone euro, on s’est rendu compte que ces divergences de compétitivité avaient été aggravées et que nous avons des déséquilibres internes qui, en réalité, ne sont pas soutenables. D’où l’importance du message « assez consensuel » donné lors du
déjeuner à Herman Van Rompuy pour indiquer que « parmi les déséquilibres internes à la zone euro mais aussi au sein de l’UE, le chômage constitue un déséquilibre ». Pour Pervenche Berès, cela signifie que la question de l’emploi ne peut pas être abordée en termes d’offre ou de demande. Il faut absolument intégrer les deux dans une approche macroéconomique, a-t-elle affirmé. « Il ne faut pas considérer l’emploi comme un solde d’une stratégie de croissance dont on ne connaît pas la capacité de création du nombre d’emplois d’autant plus que, si on veut résoudre la question obsessionnelle, à juste titre, pour les ministres des Finances, de la réduction des déficits, l’emploi doit être considéré comme un atout au regard de la compétitivité et de l’innovation et le chômage comme un coût excessif puisque cela prive la société de la compétitivité et de l’innovation de travailleurs, que cela représente une diminution de recettes pour le budget des États et que cela représente un coût en termes d’indemnisations », a déclaré Mme Berès en précisant que tel est le message « très fort » adressé à Herman Van Rompuy par le Conseil informel lors du déjeuner. Et Pervenche Berès d’insister sur le fait qu’ «encore une fois, l’enjeu n’est pas de savoir qui, entre l’ÉCOFIN et l’EPSCO, est le premier Conseil. Tout le monde s’en fiche au niveau des citoyens ! L’enjeu est de savoir ce qui a raté en 1997 avec le Pacte de stabilité et de croissance ». Et de rappeler que Jacques Delors avait dit qu’il fallait des critères en termes d’emploi. Et, a commenté Mme Berès, « jusqu’à présent, ils n’étaient pas là ! » Pour la députée européenne, « c’est aujourd’hui que nous est donnée l’occasion de corriger ce tir. Il y a une fenêtre d’opportunité et je pense que ce Conseil informel était très important et très utile pour essayer d’ouvrir cette brèche ».
Laurette Onkelinx: importance de la ligne directrice n°10 sur les aspects sociaux de la stratégie UE 2020
Vendredi 9 juillet, les travaux ministériels se sont poursuivis dans le domaine des politiques sociales. Ils étaient divisés en deux séances de travail: la première, présidée par la ministre belge des Affaires sociales, Laurette Onkelinx, a porté sur la dimension sociale de la nouvelle stratégie UE 2020 ; la seconde, présidée par le ministre belge des Pensions, Michel Daerden, a abordé les questions de pension et d’inclusion sociale, en s’intéressant plus particulièrement au rôle essentiel des systèmes de protection sociale dans le contexte de la crise économique. Le commissaire Laszlo Andor a présenté son Livre vert sur l’avenir des pensions, rendu public ce mercredi (EUROPE N° 10176).
Tirant les conclusions des travaux, Laurette Onkelinx a mis en exergue les points suivants: (1) le développement de nouveaux instruments est plus que jamais une nécessité si l’on veut que le Conseil EPSCO joue un rôle central aux côtés du Conseil ÉCOFIN dans la gouvernance économique et sociale de l’UE ; (2) chaque ministre a souligné l’importance de la ligne directrice n°10, qui se focalise pour la première fois sur des aspects spécifiquement sociaux de la stratégie UE 2020. Dans ce cadre, les ministres ont donné mandat au Comité de protection sociale pour développer un set de nouveaux indicateurs capables de suivre la mise en œuvre des différents points de la ligne directrice n°10 et d’être ainsi la première pierre du renforcement d’un processus de convergence sociale ; (3) la mise en œuvre de la clause sociale horizontale (art.9 du Traité de Lisbonne), laquelle impose une dimension sociale pour chaque politique mise en œuvre au niveau européen ; (4) la méthode ouverte de coordination (MOC) a été unanimement saluée comme « un trésor pour l’échange de bonnes pratiques ». Michel Daerden a appelé les États membres à réfléchir aux questions posées dans le Livre vert de la Commission, et plus particulièrement au problème d’adéquation et de soutenabilité en matière de pensions.