Mardi 13 septembre 2016
Tribune parue dans Libération.fr
Par Pervenche Berès (S&D), Sylvie Guillaume (S&D), Emmanuel Maurel (S&D), Julie Ward (S&D), Hugues Bayet (S&D), Karima Delli (Verts/ALE), Eva Joly (Verts/ALE), Sven Giegold (Verts/ALE), Gérard Deprez (ALDE), Fabio De Masi (GUE/NGL)
Suite à l’annonce vendredi du recrutement de l’ancien président de la Commission européenne par la grande banque américaine, des politiques dénoncent un conflit d’intérêt de responsables politiques et réclament des sanctions.
L’annonce du recrutement de M. Barroso par Goldman Sachs au lendemain du Brexit symbolise une dérive inacceptable: celle du conflit d’intérêts de responsables politiques. Avec le recrutement de M. Barroso, l’objectif affiché par Goldman Sachs est de contourner la perte de leur «passeport européen» depuis Londres.
Que celui qui a eu pour fonction de diriger l’institution en charge de défendre l’intérêt général européen devienne l’employé d’une banque d’investissement américaine qui se joue des lacunes européennes pour accroître ses bénéfices est profondément choquant.
Pantouflage manifeste
Les fonctionnaires de la Commission européenne ne s’y sont d’ailleurs pas trompés: ils ont eux-mêmes immédiatement lancé une pétition afin de dénoncer un tel pantouflage qui a déjà reçu 140 000 signatures. La médiatrice, de son côté, a également exprimé ses réserves sur ce recrutement, et M. Juncker a répondu.
Au lendemain de la rentrée parlementaire, nous lançons au Parlement européen une initiative*, qui va dans le même sens afin de mettre fin à ces pratiques qui sapent la confiance des Européens et nous choquent: nous appelons nos collègues à nous rejoindre en signant la déclaration écrite que nous déposons. Le cas de M. Barroso constitue une violation claire et manifeste de l’article 245 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et du serment fait par ce dernier, le 3 mai 2010.
Réclamation auprès de la Cour de justice
C’est pourquoi nous demandons au Conseil et à la Commission de saisir la Cour de justice de cette situation, conformément à l’article 245 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne. C’est à elle qu’il appartient, en droit, de se prononcer sur le cas de M. Barroso et de déterminer les conséquences qui en découlent quant à ses droits à la pension et aux autres avantages en tenant lieu.
Par ailleurs, nous demandons une révision du code de conduite pour porter à une législature – cinq ans – les règles anti-pantouflage, qui, à ce jour, ne courent que pendant les dix-huit mois suivant la fin du mandat des commissaires.
Bien sûr, les commissaires européens ont le droit d’avoir une carrière après leur mandat ; cependant, des règles strictes doivent empêcher les abus et une traçabilité des contacts entre eux et leurs anciens collaborateurs est indispensable. Le respect de la démocratie exige que soit mis un terme à ces agissements. Il est temps que nos règles soient à la hauteur des attentes des Européens dans la Commission européenne et dans le Parlement. Restaurer la confiance des Européens dans l’Union, c’est aussi empêcher que ceux qui lui doivent tant puissent lui nuire.
*Lire : La déclaration écrite présentée au titre de l’article 136 du règlement « sur la mise en œuvre de l’article 245 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à l’encontre de la prise de fonctions de José Manuel Barroso au sein de la banque Goldman Sachs ».
L’article sur Libération : http://www.liberation.fr/debats/2016/09/13/jose-manuel-barroso-a-goldman-sachs-la-nomination-de-trop_1495572